La sélection des reproducteurs
Voir une portée c’est toujours terriblement mignon. Leurs petites bouilles craquantes cachent en réalité une véritable réflexion et des choix que je vais essayer de vous présenter rapidement. Je vais vous parlez à la fois du travail de sélection allant du génotype (définit comme l’ensemble des gènes contenus dans les cellules d’un organisme, patrimoine héréditaire) au phénotype (ensemble des caractères appartenant à un individu, manifestation apparente de caractère produit par l’interaction du génotype et du milieu).
Les reproducteurs au Livre des Origines Françaises
Si vous souhaitez retrouver le processus qui permet d’amener un chien à la reproduction au LOF, je vous recommande l’article « On est prêt ! ». Vous comprendrez qu’il faut du temps et plusieurs filtres afin d’en arriver là. Une fois cette première sélection, il faudra trouver le deuxième géniteur et là, d’autres éléments entre en ligne de compte…
La compatibilité génétique
L’éleveur doit s’assurer de la compatibilité génétique de ses reproducteurs. Cela sous-entend que plusieurs points sont à surveiller :
- Les tests génétiques
Ils portent sur un ensemble de pathologies mis en surveillance par le club de race tout particulièrement. Certaines maladies sont spécifiques à une race, mais la plupart du temps on les retrouve d’une race à l’autre. Ses maladies sont ainsi détectées lors de tests ADN et sont annotées en fonction de leur niveau d’expression.
Le chien peut donc être indemne ou hétérozygote non muté ou noté +/+. C’est ce que l’on recherche à maximiser. Il n’y a ici aucune chance que le chien soit atteint de quelques façons par la maladie.
Le chien peut être porteur sain, sous la forme hétérozygote mutée, noté +/-. Dans ce cas on cherchera un chien indemne pour reproduire avec lui. Pour l’ensemble des maladies dites récessives (qui ne s’expriment que si les deux parents transmettent la copie altérée du gène), les descendants auront donc 50 % de chance d’être des porteurs sains également et donc ne développeront pas la maladie au cours de leur vie. Et 50 % seront indemnes. Enfin, les chiens touchés ou homozygotes mutés, notés -/- sont très souvent évincés ou le devraient. Tout comme les hétérozygotes mutés (+/-) de maladies autosomiques dominantes. En plus du bon sens pour la descendance de ces chiens, c’est ce qui est recommandé par la SCC. Si tel n’est pas le cas, des raisons phénotypiques sont souvent exprimées et la reproduction de la descendance sera plus sévèrement traitée. De cette manière, les maladies liées aux races se font plus rares et tendent à disparaitre. Tout en préservant une certaine diversité génétique en évitant d’évincer les porteurs sains.
- Les tests physiques
Tout comme les tests génétiques, ceux qui concernent les caractéristiques physiques sont appréhendés en fonction de cotation. La dysplasie de hanches et des coudes, par exemple, est noté 0 ou 1 pour les coudes. A, B, C, D ou E pour les hanches, du meilleur au pire. Chez le berger australien, seuls les reproducteurs 0 pour les coudes et A, B ou C pour les hanches sont autorisés à la reproduction. Mais attention, les individus notés C ne seront autorisés en reproduction qu’avec des individus A. Mais il ne faut pas oublier que les facteurs environnementaux comptent pour beaucoup dans la dysplasie. S’il est nécessaire de sélectionner des reproducteurs sains, l’éleveur comme le nouveau propriétaire d’un très jeune chien devrait être conscient de leur influence dans le développement de la maladie.
En conclusion, la première sélection commence par comparer les résultats des tests génétiques et physiques les uns après les autres. C’est un petit jeu de patience à base d’abréviations et seulement lorsque la correspondance est bonne on peut passer à l’étape suivante !
- La consanguinité
Une fois la comparaison terminée et approuvée se pose la question de la consanguinité.
Spoiler alerte ! Si vous aimez une race, quelle qu’elle soit, vous aimez une forme de consanguinité. Une race, c’est d’abord une somme de caractéristiques physiques, physiologiques même et comportementale. Pour rendre ces caractéristiques présentes à la prochaine génération, pour les rendre prévisible, il aura fallu choisir des individus les présentant également. Et parce que l’on identifie comme caractéristique d’une race des éléments très précis, c’est en reproduisant des individus ayant ces caractéristiques très précises qu’on l’obtient. Chaque race a donc un panel de reproducteurs fondateurs, qui peut définir un niveau de diversité génétique objective et limitée. Ces derniers s’inscrivent dans un livre dont on suit la filiation, le LOF… Vient ensuite la sélection de chaque éleveur et des caractéristiques qu’il souhaite mettre en avant dans sa lignée. Si je ne prône absolument pas la consanguinité, il est difficile de penser qu’une race en est indemne. Une étude récente présente d’ailleurs une moyenne de 24 % !
Au-delà du taux de consanguinité que l’on arrive à calculer en prenant 5 générations dans l’ascendance d’un individu et qui figure sur chaque pedigree, il est intéressant d’identifier les parents communs. Il est intéressant de comprendre qui sont les individus qui sont en commun dans les pedigree ? Quelles sont leurs caractéristiques physiques ? Comportementales ? Quels sont les évènements dans la race qui ont donné lieu à cette hausse de la consanguinité (importation récente, nouvelle race, nouvelle restriction d’une maladie) ?
Les caractéristiques de races et le tempérament
Lorsque l’on parle d’un Berger Australien, on s’attend à trouver un certain nombre de traits physiques et comportementaux caractéristiques. Et le choix de l’importance du marquage de ces traits va dépendre en partie des choix d’élevage. Chez l’Australien l’ossature doit être bien présente, les queues courtes sont très appréciées pour donner cet effet « cul d’ours ». Le poil est très développé, jusqu’à laineux sur certains individus. Beaucoup ont tendance à développer de l’obésité rapidement… En terme comportemental, il peut y avoir de la prédation mouvement, une intolérance à la frustration et une socialité aléatoire…
Un éleveur qui aime les chiens qu’il élève doit être conscient de ses défauts et de ses qualités. Et pour moi, le travail d’élevage doit faire valoir le tempérament autant que la santé. L’esthétisme vient ensuite !
La queue d’un chien lui permet de communiquer que ce soit avec vous et avec ses congénères. Un beau poil est le reflet d’une bonne santé. L’obésité diminue la durée de vie en bonne santé… Et en terme comportemental beaucoup de propriétaires de chien ne sont pas prêts, ni n’ont l’envie de travailler des problématiques telles que la réactivité au mouvement, ne sauront pas forcément faire une excellente socialisation ou bien réagir aux comportements de décharge et aux vocalisent liées à la frustration. Il s’agit donc d’éviter ou de maximiser les chances de trouver certains traits de tempérament que l’on peut rencontrer en éducation.
C’est pourquoi il faut un certain temps avant de trouver le match parfait qui maximisera la santé, avec deux reproducteurs qui vont bien et qui sont compatibles génétiquement. Un match, qui maximisera également le tempérament avec 2 chiens dont les caractéristiques sont moyennement marquées ou bien se compensent.
En conclusion
On dit souvent qu’un chien c’est 35 % de génétique et 65 % d’environnement. Dans le tempérament, il y a donc une partie des caractéristiques intrinsèques à la race, qui ont tendance à persister au travers des générations. Le choix des reproducteurs s’est donc basé sur leurs caractéristiques comportementales modérées et leur complémentarité (pas de prédation mouvement, bonne gestion de la frustration, une envie de faire plaisir et d’apprendre). Le choix d’une queue longue était important pour moi (participer à leur communication), comme le gabarit et le poids (éviter les physiques trop osseux qui fuit les agrés d’agility et les longues balades, les métabolismes qui tombent facilement dans l’obésité).
La sélection des géniteurs n’est qu’un début. Si l’on veut donner un maximum de chance à un chien d’aborder la vie sereinement et de pouvoir s’adapter aux nouvelles situations, de nombreux apprentissages sont nécessaires… C’est le « 65 % » qui devrait donc parvenir à canaliser et rediriger cette part initiale. Et cela devrait être fait le plus tôt possible. C’est ce que vous allez bientôt découvrir au travers de nos protocoles de développement et activités d’éveil précoce…